Dépénalisation de la vie des affaires au détriment de la moralisation du droit des affaires
Le rapport Coulon, demandé par sarkozy, sur la "dépénalisation de la vie des affaires " recèle de bonnes propositions mais également des suggestions qui dépénalisent le droit des affaires et qu’à ce titre il ne peut recevoir un écho favorable, uniquement des personnes intéressées.
Commençons par ce qui semble être positif : La "class action". Ce vocable d'origine anglo-saxonne désigne une procédure collective faite au nom de l'ensemble des victimes d'un préjudice unique, quand bien même ces victimes ne seraient pas identifiées. Ainsi le principe de droit que "nul ne plaide par procureur " serait quelque peu écorné. Ce principe n’admet que les recours individuels ce qui peut être dirimant à l’obtention de réparation faute de moyens financiers. La Class action ou action de groupe aurait pour avantage de mutualiser les frais d’avocats aux fins d’assurer un recours devant les juridictions en vue d’obtenir l'indemnisation de préjudices. Cette proposition va dans le bon sens, cependant Rachida Dati vient de déclarer "je n'y suis pas hostile, mais à condition d'avoir d'abord réformé l'environnement juridique des entreprises car il ne faudrait pas que l'action de groupe déstabilise la vie économique. C'est ce que souhaite le président de la République. On y travaille. " (les echos.fr du 20.02.08). Comprenez cette mesure est reportée sine die.
Par contre le discours est tout autre lorsqu’il s’agit du délit d’Abus de Biens Sociaux (ABS)
L’ABS est, entre autres, "le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles […] ou le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des pouvoirs qu'ils possèdent ou des voix dont ils disposent, en cette qualité, un usage qu'ils savent contraire aux intérêts de la société, à des fins personnelles " (article L241-3 du code du commerce). Mais depuis vingt ans, tout concourt à la dépénalisation des affaires : il y a eu l’ordonnance de 1986 (sous Chirac), la loi "nouvelles régulations économiques" de 2001 (sous Jospin), des lois en 2003 et 2004, et jusqu’aux récentes lois de décembre 2007 et janvier 2008 (sous Sarkozy) sur la consommation. (Renaud Lecadre libération.fr 19 février 08).
En matière de délit, la prescription de l'action publique est de trois années. Celle-ci, en règle générale, commence à courir à la fin des faits sauf en ce qui concerne le délit de favoritisme et l’Abus de Biens Sociaux. Dans ces deux derniers cas, le délais de prescription de l'action publique commence à la découverte des faits. Ce qui signifie que c’est l’épée de Damoclès qui pouvait s’abattre à tout moment sur les délinquants en col blanc. C’est cette moralisation du droit des affaires que veulent remettre en cause Sarkozy et Dati. Pour faire bonne mesure, le groupe de travail propose d’alourdir de deux à trois ans de prison la peine pour délit d’initié (contre cinq ans pour l’ABS). Les juristes savent qu’il est très difficile de prouver un délit d’initié (délit très rarement condamné, bien que souvent poursuivi pénalement, faute de preuves tangibles en amont)
C’est le double mouvement pénal du gouvernement Sarkozy: Pénaliser les mineurs et dépénaliser les affaires. N’oubliez pas de mettre de pièces dans l'horodateur. Détournez 10 millions d’une société plutôt qu'une orange ! Faire preuve d’autant de laxisme contre la délinquance en col blanc est destructeur sur le plan économique comme sur le plan social. En avant pour un droit des affaires à la Berlusconi !