pensées critiques en ces temps de « non- pensée » ou le visage de l’altérité politique

Publié le par jps

Un magazine avait publié une statistique indiquant que 60 % des députés, en France, avouaient ne rien comprendre à l’économie. Même les économistes, entre eux, ne sont pas d’accord mais le pire est que ces députés décident, dans beaucoup de domaine, y compris économique. Belle aberration ? !! En fait, ces députés, comme les ministres, sont conseillés par leurs experts, qu’ils choisissent parmi ceux qui partagent leurs opinions. Quelle stupidité !

Les libéraux font confiance au marché. Mais, dès les années 30 certains économistes académiques qui n’étaient ni révolutionnaires, ni marxistes ont réfuté ce principe. Dénigrant les soi-disant vertus du marché, qui garantiraient la meilleure allocation possible des ressources, la distribution des revenus la plus équitable. Ce sont des aberrations ! " Nous avons tous souvenir de l’Erika et de ses ravages : les conséquences du naufrage de ce navire ne sont que l’une des facettes nombreuses de la destruction du cadre de vie, qui souffle en ouragan ses dévastations depuis les bords de mer jusqu’au cœur des cités banlieusardes (aux vies en charpie). Explosés: la vie, le temps, l’espace. Ces ravages répondent en écho à la terrible annonce suivante qui ne s’impose malgré son évidence jamais à la une d’aucun journal : nous sommes entrés dans une période de destruction des paysages des vies et des villes en temps de paix. Pas en temps de guerre, non, en temps de paix ! De même qu’avec la flexibilisation du travail, ses innombrables dérégulations, le travail et la vie en pointillés, le capitalisme fait exploser les cadres temporels de l’existence humaine, de même, avec la destruction des paysages, il en fait exploser également le cadre spatial. Éclaté, le temps de la vie quotidienne a été dynamité. Ravagé, l’espace de la vie quotidienne aussi a été explosé. Et tout ceci, dévastation de la vie quotidienne, massacre du temps et de l’espace, paralysie du désir de politique, étouffement de la politicité humaine, en temps de paix ! " (Robert Redeker, New York, 1er décembre 2000) Par ailleurs, nous constatons une augmentation du stress au travail conduisant de plus en plus fréquemment à des suicides, à l’instar de ce qui se passe chez Renault.

Ce fâcheux constat n’ira qu’en s’amplifiant car la collusion des médias avec sarkozy participe à faire perdurer l’idée que la seule solution est de faire confiance au marché et ainsi de valider la politique de sarkozy dans son ensemble. Ils ont, entre autres, œuvré de la sorte pendant la campagne électorale des présidentielles et continuent pour les législatives et continueront encore et encore. " Les intérêts politiques et économiques en jeux influencent de manière importante la façon dont les médias rendent compte de la politique " ( chomsky ­, auteur de quelque 70 livres dont la Fabrique de l'opinion publique) Le caractère incestueux des relations entre journalistes politiques et les politiques est désormais affiché. Catherine Pégard (du Point) et Myriam Lévy (du Figaro) occupe, respectivement à l'Élysée (pour sarkozy) et à Matignon (pour Fillon), le poste de conseillère en communication. Cette propension à contrôler l’information ou ce qui est plus juste d’appeler propagande se retrouve dans les collectivités publiques et établissement publics, notamment à fiscalité propre. Les citoyens trouvent normal la création de tel service (avec nos impôts) et ne prennent pas conscience que ceux-ci et cette collusion sont voués au façonnement de l’opinion. " La concentration de plus en accrue des médias, entre les mains d’un nombre de plus en plus restreint de tyrannies privées, accentue encore plus cette tendance lourde vers la marginalisation du public [...] une "minorité intelligente" chargée du domaine politique, est responsable de "fabriquer le consentement" du peuple, lorsque la minorité des hommes responsables" ne l'avaient pas d'office [...] Les médias procèdent souvent à une dichotomisation des faits et de leur interprétation, mettant l'accent sur ceci et minorant cela. " (Normand Baillargeon – Autodéfense intellectuelle ) Lors de la dernière période électorale chacun pouvait remarquer qu’en ce qui concerne les temps de paroles ceux-ci étaient peut être équitablement répartis en quantité mais non en qualité. Que de minutes diffamantes à l’endroit de Ségolène et même temps pour encenser sarkozy ! On peut ainsi glorifier ou dénigrer ce dont on parle par le seul choix des mots.

Le discours politique mérite d’être décortiqué et les conseillers en communication sont là, entre autres, pour inclure dans la sémantique des mots vagues, ambigus, qui sont forts utiles. " Le faux dilemme qui fait croire (faussement) qu’il n’y a que deux possibilités ; on donne ensuite à entendre qu’une est exclue ; et on conclut que l’autre doit donc être vraie.) La généralisation hâtive qui consiste à généraliser trop vite et à tirer des conclusions à propos d’un ensemble à partir d’un trop petit nombre de cas. L’Ad hominem qui consiste à attaquer la personne qui énonce une idée plutôt que l’idée elle-même. " " (Normand Baillargeon – Autodéfense intellectuelle ). Les médias, les conseillers en communication et les politiques réfutent, à l’instar de Harold Laswell (l'Encyclopedia of Social Sciences) le "dogmatisme démocratique". Ils considèrent que les gens ordinaires sont dans l’incapacité " de déterminer eux-mêmes leurs besoins, leurs intérêts " et que, de ce fait, une élite peut discipliner les esprits du peuple.

Dans ces circonstances c’est se fourvoyer que de croire que nous sommes en démocratie. Comme le dit Jean-Jacques Rousseau nous croyons que nous sommes libres parce que nous élisons nos représentants tous les cinq ou six ans, suivant le cas, mais en fait cette petite liberté ne s’exprime que le jour de l’élection ensuite c’est un chèque en blanc.

Il est remarquable que sarkozy et ségolène se partagent, en se les appropriant, différentes réflexions de Cornelius Castoriadis ( Post-scriptum sur l’insignifiance). L’un particulièrement sur le constat et l’autre surtout sur les solutions.

Comme Cornelius Castoriadis , Sarkozy (quel honneur je fais à ce dernier de le comparer à lui), estime que les responsables politiques sont impuissants face au marché. La seule chose qu’ils peuvent faire, c’est suivre le courant, c’est-à-dire appliquer la politique ultralibérale à la mode. De même, Sarkozy est convaincu que l’homme est fatalement dominé par le langage et que le symbolique est en quelque sorte un arrangement du sens, comme l’avait souligné Cornelius Castoriadis, avec la composante de l’imaginaire (voir dans une chose ce qu'elle n'est pas) mais un imaginaire conceptuel (Robert Redeker). Le symbolique comporte presque toujours une composante " rationnelle-réelle " mais cette composante est tissée inextricablement avec la composante imaginaire effective (Florence GIUST-DESPRAIRIES). Le symbolique n’est pas neutre, c’est pourquoi sarkozy l’utilise non seulement dans le langage mais également dans l’image. D’un point de vue linguistique, comme le souligne Judith Bernard, dans " travailler plus pour gagner plus " on entend " plus-plus " (Emission ASI). En terme d’image, Pourquoi sarkozy affiche t-il rachida Dati et l’inclue dans son gouvernement ? Pourquoi intègre-t-il dans celui-ci des personnalités venant de la gauche ? C’est pour envoyer des messages d’ouverture mais en fait il ne renie rien de son programme ultralibéral, communautariste et atlantiste. Ces personnes servent de caution pour les échéances électorales qui restent à venir (législatives, cantonales et municipales). Il est prévu en coulisse (et si la vague bleue se vérifie aux législatives) d’avancer les dates des deux tours des municipales aux 21 et 28 octobre 2007 dans le seul but d’avoir très rapidement les mains libres pour prendre des mesures impopulaires et de ne pas souffrir, par la suite, d’une sanction électorale. (même si sarkozy s’est engagé auprès du congrès des Maires de ne pas avancer la date de ces élections, mais on sait que pour sarkozy les promesses n’engagent que ceux qui veulent bien les entendre).Pour Sarkozy : " Il faut choisir : se reposer ou être libre. " , (Thucydide). Pour Sarkozy " Si vous voulez être libres, il faut travailler. " ( Périclès). Sarkozy pense que " arbeit gibt frei ". Le travail donne la liberté. Toutes ces apparentes évidences sont relayées par les médias.

Plus globalement, il y a donc une contre-éducation politique qui s’effectue visant précisément à convaincre le peuple qu’il y a des experts à qui il faut confier les affaires. Ségolène réfute cette idée et croit à l’intelligence collective. Se rapprochant des propositions de Cornelius Castoriadis, elle préconise une démocratie participative et des jurys citoyens. Appropriation collective de ce qui est public et mise en exergue de l’imagination créatrice Pour en sortir, faut-il s’inspirer de la démocratie athénienne ? Qui élisait-on à Athènes ? On n’élisait pas les magistrats (Au demeurant Ségolène ne le prévoit pas de cette manière, et c’est très bien). Ils étaient désignés par tirage au sort ou par rotation (Florence GIUST-DESPRAIRIES). Ségolène pense, comme Normand Baillargeon, qu’il est "hautement désirable que, dans une démocratie, les citoyennes et citoyens soient informés des questions qui les concernent et qu’ils en jugent et en discutent en s’efforçant de tirer des inférences valides de faits connus ou admis, bref, en faisant preuve de rationalité et de pensée critique ". " Il n’est pas nécessaire d’avoir un diplôme universitaire pour être un sceptique " (Carl Sagan), à l’exception de certaines activités nécessitant des spécialistes qui seront élus au sens "choix des meilleurs ". Pour ce faire, il est nécessaire que "la doxa soit cultivée. Et comment une doxa concernant le gouvernement peut-elle être cultivée ? En gouvernant. Donc la démocratie - c’est important - est une affaire d’éducation des citoyens, ce qui n’existe pas du tout aujourd’hui " (Florence GIUST-DESPRAIRIES)

Les situations de précarité, qui ne favorisent pas l’activité civique, s’accroissent et c’est ainsi que subrepticement se met en place cette formidable régression : une non-pensée produisant cette non-société, ce racisme social. Cornelius Castoriadis relève que c’est de la responsabilité du citoyen de lutter contre ses preuves objectives de l’existence d’une propagande médiatique et Normand Baillargeon recommande à chacun d’entre nous d’examiner, de juger les informations et d’augmenter notre capacité à raisonner juste et à ne pas (trop) être victime de la propagande. C’est " bien une conception de la société et de la démocratie qui est ici mise en jeu ". Il faut participer et non être un spectateur passif. Quelle erreur de croire à l’impossibilité d’envisager un futur différent du système dans lequel nous vivons !

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D
Je suis venu ce soir pour la 1ere fois sur ce site suite à un lien, merci pour ce superbe article correspondant tellement à l'actualité ambiante j'en ai d'ailleurs profité pour le faire passer à plusieurs collègues j'espère seulement qu'elles le recevront. Merci d'éclairer les méninges des lecteurs qui je l'espère seront nombreux à visiter ce blog.
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F
Tu es fous, c'est super long à lire ton article !Même si c'est passionnant.Heureux de voir cité Castoriadis; Je l'ai découvert grâce à Mermet et j'ai en mémoire cette formidable série d'émission en compagnie du bonhomme !Pour ta conclusion, tu arrives à la même que moi sur mon blog : il ne faut pas regarder le spectacle mais rester sur le terrain politique.Mais la pression médiatique est terrible !:-)[Je voudrais faire cette remarque à but constructif : ce serait bien que tu mettes un peu plus d'air dans tes articles longs. Une ligne blanche de temps en temps pour reposer l'oeil du lecteur ! :-) ].
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L
Bonjour,Je découvre votre blog.  a+Lpv
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